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Le bo jutsu

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Bo jutsu

Comme les contacts physiques ne sont pas autorisés pour le moment dans les dojos, notre dojo comme beaucoup d’autres a profité de la pandémie pour travailler davantage les armes longues. Je pense que c’est dans l’ordre naturel des choses que d’utiliser des outils qui nous permettent de demeurer à une distance sécuritaire de notre partenaire d’entrainement.

Le bo jutsu reprend du panache. On peut le considérer comme un art martial complet en lui-même. Comme bien des arts martiaux, on peut l’aborder de façon sportive, chorégraphique ou guerrière. Essayons de démêler ces diverses catégories. Séparons d’abord ce qui est guerrier de ce qui est artistique. De nos jours, dans les compétitions d’arts martiaux, on peut voir des gens faire tourner le bo à des vitesses extraordinaires. Ils le font pivoter autour de leur tête, tournoyer du bout des doigts tout en effectuant un jeu de jambes qui ressemble étrangement à de la danse. Dans bien des cas, on utilisera un bâton léger, qui n’a rien à voir avec un bo traditionnel en chêne. J’adore voir ce type de prestation artistique, les gens sont d’une habilité exceptionnelle, mais je ne classe pas cela comme étant un art martial. Ce type de maniement n’a pas sa place sur un champ de bataille et ne fait pas partie du budo.

Les katas

Il existe un grand nombre de katas de bo où l’on doit affronter un adversaire au sabre ou parfois avec d’autres armes. Ces katas sont une base, un échelon où l’on apprend les rudiments du bâton. On y voit les divers enchaînements, les frappes de base, les feintes, les blocages et tout ce qui concerne l’ABC pour débuter dans l’art du bojutsu. Mais, se limiter à reproduire ces katas de manière robotisée ne permet pas d’exploiter la pleine capacité de cette arme qu’est le roku shakku bo.

La prochaine étape consiste à insuffler de la vie dans la forme morte du kata. Beaucoup de gens effectuent ces formes en suivant un rythme régulier comme s’ils étaient guidés par un métronome. Selon l’enchaînement, si l’on veut rendre le combat réaliste, il faut modifier le rythme et ne pas demeurer dans une logistique linéaire. On doit jouer sur les angles afin que l’adversaire soit débordé, l’amener à un point où il ne saura pas où aller. On utilise du kyojutsu, on joue avec kokyu ho, on utilise du sakki jutsu. Si le kata se fait uniquement au niveau physique, il n’est pas adapté au champ de bataille.

Bo furi

Les furi sont ces exercices de tournoiements du bâton. Ils n’ont pas pour but de faire joli; ils font partie d’une stratégie d’intimidation de l’adversaire. Au niveau le plus basique, le bâton demeure à la même place sur une même ligne. Sans qu’on le réalise, nous nous déplaçons de chaque côté du bâton. Cet exercice est la première étape du bo furi et, à ce stade, on est loin de pouvoir faire un combat. Lorsqu’on le travaille contre un adversaire, il faut réussir à mettre suffisamment de pression sur l’adversaire pour l’obliger à reculer. Il faut que notre distance soit toujours sécuritaire, être suffisamment loin pour éviter une attaque-surprise, mais suffisamment proche pour frapper l’adversaire si l’occasion se présente. Une fois que l’on a maîtrisé cette compétence, il faut pouvoir manipuler l’adversaire pour le diriger là où l’on veut. Je démontre souvent à mes étudiants que l’on peut forcer l’adversaire à tourner à 90 degrés si l’on s’y prend bien.

On peut voir sur le web énormément de gens effectuer des démonstrations de bo furi. Le bâton virevolte rapidement et c’est du plus bel effet. Mais si l’on prend le temps de regarder le jeu de pied, on réalise que c’est du surplace, qu’il n’y a souvent pas ce travail des jambes qu’exige le budo en général. Par exemple lorsque l’on remonte le bâton vers l’avant, ce geste servait souvent à crocheter le hakama de l’adversaire. Le bâton se prenait dans la culotte ample et obligeait l’adversaire à se cabrer sur ses lombaires. Notre corps est aligné vers l’avant à ce moment-là. Si l’on demeure debout sans assujettir notre position, il est impossible de contrôler l’adversaire.

Du taijutsu efficace

L’utilisation des armes dans le budo nous oblige à mieux percevoir nos erreurs. Je dis souvent à mes étudiants que les armes sont des amplificateurs d’erreurs. Oui, c’est plus difficile au début de travailler avec des armes, mais une fois qu’on a fait l’effort, cela se répercute positivement dans tous nos mouvements et nos déplacements.

Bernard Grégoire

Dai Shihan Bujinkan Québec

Source : https://bujinkanquebec.wordpress.com/author/bujinkanquebec/

Kankaku: Trust Your Intuition

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Sensei introduced the class with a three-legged crow (stuffed). He told us that Yatagarasu (the crow) guided Emperor Jimmu in the Japanese invasion. (1)

Yatagarasu represents the will of heaven, it emanates from the sun goddess, Amateratsu. He added that Yatagarasu is often described also as a Karasu Tengu. (2) It is Ninjutsu related.

This excellent introduction done, he showed us two old ninjatō that he recently acquired. Their huge Tsuba were impressive. Small blades, but not straight; and with long scabbards like regular swords.

This is also 虚実, Kyojitsu, alternating truth, and lies. Deception is the essence of Ninjutsu. He said that we have to trust our feelings and expect the unexpected (like a short blade in a regular scabbard). Everything we train now is about Kankaku: feeling. (3)

A few years ago, Senō sensei told us that Kankaku and Waza were like our legs. We need both legs to walk. It is the same in Budō, we need technique and feeling. One leg is the Waza, and the other is Kankaku. If you develop only one leg, you get tired and don’t reach your destination.

As always with this language, there are many ways to understand “Kankaku” in Japanese. It is “feeling” and “intuition” at the same time. Intuition, from the Latin “intuitus” means to watch thoroughly or to contemplate. So, are our feelings linked to the way we look at things? If so, why is it translated by feeling? To understand this paradox, we must study each kanji.

When you separate the characters composing Kankaku, you get “Kan” and “Kaku.” “Kan” alone means “feeling.” (4) “Kaku” is more interesting, it means “to be able to read the mind.” (5) This ability to read the invisible; to read between the lines, is what we train now at Honbu. We have to hone our skills to feel the situation, space, and attacker altogether. Inside and outside. Twice during class, Sensei told us to be aware of our surrounding. We must “see” (intuitus) what we feel. During training, he asked us to attack our neighbors while doing the techniques.

Also, some Dai Shihan demonstrated the movements with their partners. But Nagase and Nakadai sensei were attacking them from dead angles. Sensei explained that the battlefield is a mess. Attacks often come from unseen directions. If you only focus on your opponent, you might end up dead.

In Kankaku, Kaku, (3) alone, is “Satori,” the same character for “enlightenment” they use in Zen. I guess that when you reach Satori, you can read your own mind. He also referred to Zen Buddhism after painting a circle on a piece of paper. It seems that all is connected, at least it felt like that yesterday night.

Our problem is that it is impossible to do. I guess this is why Sensei told us not to try to do things, but to move freely. One day it will work by itself. Then, this is why memorizing forms is useless.
But is it really unnecessary? (6) Playing with the sounds of “Kankaku,” it is interesting to see that “Kakueru” also means to “memorize.” (7) So could it be that we have to “memorize the feeling” to move without intent?

Also, 看過苦, “Kankaku, written in this way, could mean “turning a blind eye to pain.” (8) (9) Remember that we don’t know which “Kankaku” he is referring to when he says it. Is it 感覚 or 看過苦? We don’t know.

Trusting your feelings is the way to go after you learned the forms. There is no shortcut, It is only when you know something that you can forget it, and be natural. (10)

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  1. 八咫烏, “eight-span crow,” Yatagarasu: “Yatagarasu as a crow-god is a symbol specifically of guidance. This great crow was sent from heaven as a guide for Emperor Jimmu on his initial journey from the region which would become Kumano to what would become Yamato, (Yoshino and then Kashihara). It is generally accepted that Yatagarasu is an incarnation of Taketsunimi no Mikoto, but none of the early surviving documentary records are quite so specific”. From https://en.wikipedia.org/wiki/Three-legged_crow
  2. 鴉天狗, Karasu Tengu: crow-billed goblin. This is the famous tengu with beak and wings that you see in Jiraya. Check the Wikipedia page HERE
  3. 感覚, Kankaku: sense; sensation; feeling; intuition
  4. 感, Kan: feeling; sensation; emotion; admiration; impression
  5. 覚, Kaku is satori: Satori; folklore monster that can read minds
  6. Note: Memorizing the form is useless, once you have learned it. Remember the concept of Shuhari. You need two legs to walk.
  7. 覚える, Kakueru: to memorize; to commit to memory; to learn by heart; to bear in mind; to remember / to learn; to pick up; to acquire
  8. 看過, Kanka: overlooking; turning a blind eye
  9. 苦, Ku: pain; anguish; suffering; distress; anxiety; worry; trouble; difficulty; hardship
  10. Too many high ranks listen to sensei at the Omote level. They understand what they want, and do not follow the path of evolution Sensei has gone through. What he teaches today is the result of a whole life of training. Walk his path from the beginning, and don’t skip any lesson.

Arnaud COUSERGUE

Source : https://kumablog.org/2019/05/18/kankaku-trust-your-intuition/

Le professeur d’expérience

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La plupart des enseignants d’arts martiaux n’ont jamais eu à se battre en situation réelle. Ils possèdent une idée très théorique sur ce que doit être un combat. Lorsque l’on enseigne des techniques de défense que l’on désire efficaces en situation réelle, il y a des règles à suivre. Pour avoir dû me défendre à quelques reprises lors de mon travail en sécurité, je peux vous dire que la théorie est une chose et que la pratique en est une autre.

Premier constat: votre adversaire ne réagira probablement pas comme le fait votre partenaire sur le tatami. Cela inclut une attaque sournoise, l’utilisation du premier objet qu’il trouvera ou encore l’aide d’un comparse. Si vous croyez que votre adversaire vous laissera le temps de faire quelques étirements ou d’enlever vos chaussures avant le combat, vous aurez une surprise.

Second constat: Je vois trop souvent des enseignants qui démontrent des techniques sans tenir compte de l’autre bras de l’agresseur. Combien de fois peut-on voir une clé de poignet qui amène une mécanique facilitant un coup de poing de l’autre main ? Beaucoup de professeurs ne tiennent pas compte de l’autre main en se disant qu’elle ne peut faire beaucoup de dommage si l’on contrôle l’un des bras, ils oublient que ça ne prend pas de puissance pour qu’une tape sur une oreille nous désoriente totalement. Il néglige le fait que le bout d’un ongle peut grafigner aisément notre cornée et nous faire relâcher notre technique de contrôle que l’on croyait blindée. On fait une superbe belle technique en luxant le poignet de la main qui tient un pistolet. Oui, le canon n’est plus dirigé sur le défenseur, mais en déviant l’angle de tir, le projectile est allé se loger dans la tête d’un enfant qui regardait la scène.

Troisième constat: L’inexpérience martiale. Cela prend des années pour apprendre à voir ces lacunes. Oubliez cela si vous avez moins de dix ans d’expérience dans les arts martiaux. L’expérience s’acquiert et ne s’achète pas. L’instructeur qui se situe dans cette catégorie doit redoubler de vigilance afin d’éviter de tomber dans ces pièges. Les arts martiaux et la politique ont une chose en commun, on a tendance à se laisser impressionner facilement par un enseignant à la parole facile. On doit juger un professeur par la logique de son enseignement et non par la teneur de son discours général.

Quatrième constat: J’ai malheureusement trop souvent vu des instructeurs qui mélangeaient toute sorte d’arts martiaux et qui laissaient tellement de lacunes en exécutant certaines techniques qui au premier regard semblaient si puissantes. Ce n’est pas parce que vous êtes ceinture jaune dans dix arts martiaux que vous équivalez à une ceinture noire d’expérience. Le corps humain est capable d’encaisser beaucoup plus que ce que plusieurs personnes croient. Le coup de genou circulaire exécuté en puissance dans les airs, est peut-être moins efficace qu’on le croit sur un adversaire sous influence de la drogue ou de l’alcool.

Cinquième constat: Des étudiants trop naïfs peuvent se laisser impressionner par les discours confiants de leurs professeurs. Je dis toujours à mes étudiants « ne croyez jamais vos professeurs aveuglément, regardez si ce qu’ils vous enseignent est logique». La première étape pour devenir un bon professeur est de devenir un bon étudiant et un bon étudiant doit se poser des questions et ne pas hésiter à questionner son professeur. Si ce dernier est compétent, il pourra répondre sans se sentir stressé ou menacer. Un petit truc à faire comme étudiant, se demander comment je pourrais me sortir de cette situation. Vous constaterez qu’il est souvent trop facile de se sortir de la plupart des clés que certains professeurs garantissent comme étant sécuritaires totalement.

Bernard Gregoire

Dai Shihan Bujinkan Québec

Source : https://bujinkanquebec.wordpress.com/2019/05/13/le-professeur-dexperience/